Une simulation régionale d’orientation des victimes de la traite des personnes dans le sud de la Méditerranée se tient actuellement à La Valette, à Malte, dont les travaux ont débuté samedi dernier pour se poursuivre jusqu’à dimanche prochain. La Tunisie est partie prenante.
Suite à la mise en place, l’année dernière, du mécanisme tunisien d’orientation des victimes de la traite des êtres humains, dans le cadre du projet conjoint de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, en guise d’appui à nos instances indépendantes (Paii-T), la réflexion sur ce phénomène, si récurrent, a pris son élan. Raoudha Laâbidi, présidente de l’Instance à laquelle est confiée cette mission, a fait de son mieux pour que sa lutte puisse avoir gain de cause. Il importe, en effet, d’ôter une fois pour toutes cette épine du pied, de manière à ce que ce problème ne revienne à jamais. Cela semble aussi difficile et délicat, mais pas impossible ! A moins que tous les pays des deux rives nord-sud, dont la Tunisie, soient en première ligne du combat. Ce faisant, une série d’échanges a déjà eu lieu, dans le but de renforcer la coopération régionale, à même de hisser le niveau des professionnels dans ce domaine, notamment par le biais d’actions ciblées et de formations pluridisciplinaires.
Un crime sur les frontières
Justement, c’est dans cet esprit qu’une simulation régionale d’orientation des victimes de la traite des personnes dans le sud de la Méditerranée se tient actuellement à la Valette, à Malte, dont les travaux ont débuté samedi dernier pour se poursuivre jusqu’à dimanche prochain. Soit une semaine d’exercices pratiques et de formation sur les techniques de détection, d’identification et d’orientation des victimes, à même d’apprendre comment leur apporter, le cas échéant, assistance et protection. Ainsi, cette simulation-première a pour thème «la traite des êtres humains sur les routes migratoires ». Une question qui aura à élargir le débat et toucher l’ensemble des intervenants. Une centaine de participants prennent part à cet événement organisé par le bureau régional du Conseil de l’Europe à Tunis, en partenariat avec la république de Malte, auquel s’invitent des représentants de gouvernements, des professionnels concernés, de la société civile et des médias, venus de la rive sud de la Méditerranée et du Sénégal.
Et comme la traite des personnes est un crime qui évolue dans la clandestinité, la migration non organisée ne serait, alors, que l’arbre qui cache la forêt. Entre les deux, une fine ligne de démarcation à peine voilée. Chaque année, a-t-on appris de sources autorisées, des milliers de personnes, principalement des femmes et des enfants, sont victimes de la traite, à des fins d’exploitation, tant dans leur propre pays qu’à l’étranger. D’ailleurs, l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes (Inltp) avait, à maintes reprises, tiré la sonnette d’alarme. Et bien que 907 victimes aient été recensées en 2020, selon le rapport de l’Instance, contre 1.313 cas en 2019, soit une certaine légère baisse constatée, la prévalence d’exploitation des personnes vulnérables a pris de l’ampleur et gagné du terrain. Ce qui nécessite une coopération poussée, tant au niveau national qu’international. D’autant plus que les accords multipartites ratifiés découlent de la profonde conviction que les crimes transnationaux ne peuvent être combattus efficacement qu’avec la collaboration des Etats concernés. Cela dit, un tel engagement ne se limite pas seulement au volet judiciaire, il couvre également d’autres mesures liées à la prévention, à la protection et à l’assistance aux victimes, comme le précisent, dans ce sens, le Protocole de Palerme et la convention du Conseil de l’Europe en matière de lutte contre la traite des êtres humains.
Ce n’est qu’un début
Sur cette lancée, la rencontre de Malte serait-elle en mesure d’aboutir à des résultats probants servant de nouveaux mécanismes de traitement et de protection ? Les pays du nord sont-ils conscients que la traite des personnes est, en quelque sorte, le corollaire de leur politique de refoulement et de répression ? Leur système de gestion des flux migratoires est tel qu’il nourrit des effets contraires. Faut-il changer d’outils et de stratégies ? « L’exercice de simulation régionale en cours marque sans conteste le début d’une nouvelle étape dans la structuration de la coopération régionale contre la traite des êtres humains», déclare, à l’ouverture, Mme Pilar Morales, cheffe du bureau du Conseil de l’Europe à Tunis et également coordinatrice de la politique de voisinage avec le Sud de la Méditerranée.
De son côté, Mme Leonie Aquilina, directrice pour le développement international et les affaires économiques au ministère des Affaires étrangères et européennes et du Commerce, est du même avis : «Cet exercice de simulation est une excellente occasion pour nos parties prenantes nationales de créer des réseaux et d’échanger des idées et des bonnes pratiques». Et d’ajouter qu’aucun pays ne peut y arriver seul. Malte semble fortement impliquée à ce sujet. «Elle continue de participer à la lutte contre la traite des personnes, tout en se concentrant principalement sur les problèmes liés aux routes migratoires situées dans la région sud de la Méditerranée», note, en conclusion, Mme Rebecca Buttigieg, secrétaire parlementaire pour les réformes et l’égalité au ministère de l’Intérieur, de la Sécurité et des Réformes.